Tiens, ça faisait longtemps que je n'avais pas fait de critique de disque !
Fairly - Michel Graillier
Edité pour la première fois en 1991 par les Editions Musicales Studio S.M.", un petit label spécialisé dans la musique liturgique ou plus généralement religieuse, Fairly avait souffert d’une diffusion quasi-confidentielle.
Lorsque « Le chant du monde » fit reparaître le cet album solo en 2002, de nombreuses voix comparèrent Michel Graillier aux plus grands.
En févier 2003, peu après que Michel s’en soit parti rejoindre son ami Chet, l’accordéoniste Patrick Fournier pris contact avec « Le chant du monde » pour leur signaler l’existence d’autres prises, dont peu de personnes avaient, jusqu’alors, eut connaissance. Accompagnés par Micheline Grailler, les responsable du label sont alors parti à la recherche de ce trésor. Ils dénichèrent une cassette analogique de sauvegarde, et réussirent à restaurer les sept titres « bonus » qui éclairent le second disque. Bien que ce bijou inédit soit présenté, dans le livret accompagnant l’album, comme d’une qualité sonore inférieure, les craquements des soufflets de l’accordéon de Patrick Fournier sur « Spleen » la ballade toute parisienne de Richard Galliano, valent largement tous les traitements numériques que l’ont fait subir généralement aux rééditions…
Fairly fascine, incite à l’envol, à l’écoute silencieuse, celle qui ne peut se faire que les yeux fermés, tant on aimerait se couper de tout ce qui pourrait venir troubler ce moment de méditation. Les pièces qui composent ces « complete sessions » sont parfois inattendues, à l’image de ce « Portrait in Black », d’Antonio Carlos Jobim, figure de proue de la bossa-nova brésilienne, ou « Cavatina » de Stanley Myers, extrait « De voyage au bout de l’enfer »… L’improvisation se fait au plus près des thèmes, sur de discrètes harmonies. Un écrin fait de silences et de chants suspendus au dessus du monde.
On devine à chaque phrasé le plaisir qu’à Michel Grailler à déambuler aux cotés des géants dont il reprend les thèmes.
Ses mélodies légèrement soutenues par des graves discrètes semblent s’accrochent aux lignes originales pour mieux en révéler la beauté et les possibilité d’évasion.
Elles nous font toutes pénétrer dans l’univers intime où ses « maîtres » occupent une place immense…. La présence de Bill Evans envahit « Bill’s heart », composition qu’on trouvait déjà sur l’album « Dream drops », et le standard « My foolish heart », immortalisée par Evans au Village Vanguard avec LaFaro et Motian.
John Coltrane est omniprésent à travers une interprétation recueillie de « Central Park West » et « Naïma ». McCoy Tyner semble écouter attentivement les reprises subtiles de « Search of peace », « Aïsha et « For tomorrow », et regarder intensément Michel Graillier qui, ne cherchant pas à reproduire les impulsions flamboyantes du maître, préfère en révéler les aspects intimistes et parfois inquiets…
Contrairement à ce que l’on peut, hélas, trouver aujourd’hui dans les bacs à disques, ce ne sont plus les doigts qui jouent, ou la tête qui pense les notes… C’est le cœur de « Mickey », d’abord et avant tout, qui parle d’un amour vrai et profond, sans gravité mais sans concessions…
Malgré la nuit et les heures sombres, la vie demeure et la musique nous montre le chemin. Et l’on est surpris, lorsque que l’on ré-ouvre les yeux, de ne pas le voir le pianiste penché sur son clavier, le regard perdu dans l’infini.
« Mickey » Graillier est là, pour toujours…